15 Journée inutile. Mal réveillé, mal à l’aise. Fête de Marie sur l’Altstädter Ring. L’homme avec une voix qui semblait sortir d’un trou dans la terre. Pensé beaucoup à – quelle gêne avant d’écrire des noms – Felice Bauer. Hier « Économie polonaise » – Ottla vient de me réciter des poèmes de Goethe. Elle les choisit avec une vraie sensibilité. Trost in Tränen. An Lotte. An Werther. An den Mond. Relu de vieux journaux intimes, au lieu de maintenir ces choses à distance. Je vis aussi déraisonnablement que possible. Mais tout ça, c’est de la faute des 31 pages qu’on va publier. Plus encore, à vrai dire, de ma faiblesse qui permet que de telles choses aient une influence sur moi. Au lieu de me secouer, je reste assis et réfléchis à la façon la plus humiliante possible d’exprimer tout cela. Mais mon calme terrible réfrène mon imagination. Je suis curieux de savoir comment je vais m’extraire de cet état. Je ne permettrai pas qu’on me pousse, je ne connais pas non plus le vrai chemin, que va-t-il donc se passer ? Grande masse, suis-je définitivement fourvoyé dans mes chemins étroits ? – Alors je pourrais au moins tourner la tête. – C’est ce que je fais pourtant.
Le 13 août 1912, Kafka avait fait la connaissance de Felice Bauer (1887-1960), sa future fiancée, chez Max Brod. Nous reviendrons sur cette première rencontre.