8 IV 14 Hier incapable d’écrire ne serait-ce qu’un mot. Pas mieux aujourd’hui. Qui me délivrera ? Et cette cohue en moi, dans les profondeurs, à peine visible. Je suis comme un grillage vivant, une grille solidement installée et qui veut tomber.
Aujourd’hui au café avec Werfel. Son apparence quand on le voit de loin à la table du café. Incliné, à moitié couché même sur la chaise en bois, son beau visage de profil pressé sur lui-même, l’embonpoint (pas de véritable obésité) le faisant presque haleter, totalement indépendant du monde qui l’entoure, mal élevé et impeccable. Le lorgnon pendant, par sa nature antithétique, permet de suivre plus facilement le contour délicat du visage.
Franz Werfel (1890-1945) : personnage haut en couleur du milieu littéraire pragois, déjà plusieurs fois évoqué dans les précédents carnets du Journal. Kafka éprouvait un mélange de fascination pour son talent littéraire et de mépris pour le poète (« Je déteste Werfel ») dont les livres rencontraient un vif succès. Le « Kaffeehaus » dont il est question ici est certainement le Café Arco, situé Hibernergasse 16 : Werfel en avait fait son quartier général.