L’histoire de la fille du jardinier qui m’a interrompu avant-hier dans mon travail. Moi qui veux guérir ma neurasthénie par le travail, il me faut entendre que le frère de la demoiselle, il s’appelait Jan et il était le véritable jardinier et probable successeur du vieux Dvorsky, même déjà propriétaire du jardin floral, s’est empoisonné par mélancolie il y a 2 mois à l’âge de 28 ans. En été il se sentait relativement bien malgré sa nature d’ermite, car il était au moins obligé d’être en contact avec les clients, en hiver en revanche il était complètement renfermé. Son amie était une fonctionnaire – urednice – une jeune fille également mélancolique. Ils allaient souvent ensemble au cimetière.
Le 7 avril 1913, Kafka travaille pour la première fois chez le jardinier Dvorský, à Nusle dans un faubourg de Prague, comme il l’écrit dans une lettre à Felice Bauer : « dans la pluie froide, seulement en chemise et pantalon » Et il ajoute : « Cela m’a fait du bien. (…) Le bureau est un véritable enfer, je n’en crains plus d’autre ». Les semaines suivantes, Kafka ira à plusieurs reprises travailler chez ce jardinier, et au printemps 1918 il jardinera également dans un établissement horticole situé à Troja, un quartier de Prague.
Des années plus tard, souffrant de la tuberculose, il dira à Gustav Janouch : « Il n’y a rien de plus beau qu’un tel métier manuel. Le travail intellectuel arrache l’homme de la compagnie des hommes. Le métier manuel au contraire l’y ramène. Dommage que je ne puisse plus travailler dans un atelier ou dans un jardin. »